Journal - Mardi 15 juillet 2025


 

Hier, c’était le 14 juillet en France, mais nous, nous sommes à Żelichowo en Pologne, un village où se dresse une très belle église gréco-romaine du 14e siècle, ainsi qu’une auberge pittoresque appelée « Le Petit Hollandais ». C’est une vieille et immense bâtisse en bois avec un porche ombragé et des colombages typiques de la région. Malgré la chaleur de juillet, il fait frais à l’intérieur et ça sent la bonne cuisine et le bois. Le sol est recouvert de vieilles briques luisantes à force d’avoir été foulées. L’auberge doit son nom aux Mennonites qui ont habité la région au 16e siècle. Fuyant les persécutions religieuses en Hollande, ils se sont réfugiés dans les paysages plats et marécageux de la Poméranie. Or les Hollandais maîtrisaient l’art du drainage comme personne. Agriculteurs et gestionnaires doués, ils furent volontiers accueillis par les Polonais qui ont vu en eux l’opportunité de cultiver et mettre en valeur ces terres inexploitées. Le grand-père d’Aga était d’ailleurs un descendant de Mennonites qui sont venus s’installer pour les mêmes raisons dans la région de Poznan, mais c’est purement par hasard que j’ai réservé une table à cette auberge pittoresque parce qu’elle est à mi-chemin de l’endroit où nos amis canadiens passent leurs vacances et de Rozynka. Lui est normand et elle polonaise. Ils ont émigré au Canada il y a déjà plusieurs années. Leurs deux enfants adolescents sont nés en Pologne et ont grandi au Québec.

J’ai remarqué qu’ils avaient même un très léger accent. Nous discutons de l’accent québécois. Notre ami souligne que c’est nous, français, qui avons un accent lorsque nous sommes là-bas, puisque après tout nous sommes chez eux. Pourtant, l’accent de France semble avoir la préférence pour pas mal de Canadiens. Il y a beaucoup d’accents différents au Québec, des accents qui ne se comprennent pas forcément très bien d’une région à l’autre. L’accent français permet-il de faire le lien ?

C’est assez curieux de songer à tous ces mouvements, déménagements, changements de pays et de vie. Cette tendance à émigrer ou à s’exiler n’est pas plus occidentale qu’africaine, américaine ou asiatique. Ces mouvements accompagnent l’humanité depuis l’aube des temps. Ils sont l’expression d’une liberté fondamentale. Je ne crois pas que cette liberté soit inscrite dans la déclaration des droits de l’homme, mais elle mériterait sûrement d’y figurer.

 

« La possibilité de choisir le pays où l’on veut vivre est un droit inaliénable ! »

 

Le jardin du « Petit Hollandais » est un havre de paix, loin des turpitudes du monde. Assis autour d’une table, à l’ombre des tilleuls dans le jardin du « Petit Hollandais » nous dégustons un gâteau à la rhubarbe et buvons de la limonade à base de sureau noir. En apparence, rien de spécial. Pourtant, je ne peux m’empêcher de penser que c’est un privilège immense de pouvoir « profiter » de nos amis. Nous vivons dans des pays relativement paisibles, ils ont fait l’effort de venir en avion jusqu’en Europe. Je ne peux m’empêcher de ressentir une immense gratitude pour cet instant passé ensemble.

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