Journal - 8 juillet 2025


 Les buis

Dans notre jardin poussent des buis. A vrai dire, ils poussent un peu n’importe où, au petit bonheur la chance, et ce depuis quelques années, ici autour des rosiers, devant et derrière la maison, là au pied de la boîte aux lettres. C’est avec l’aide du papa d’Aga que nous les avions plantés. Il en avait fait une véritable production. Comme les parents d’Aga avaient des buis dans le jardin de leur maison de campagne, Czesław en coupait des brins qu’il trempait dans de l’eau avec une hormone de bouturage avant de les mettre dans de petits pots. Régulièrement, nous devions les ramener de Varsovie avec pour mission de les faire prospérer chez nous. Lorsque nous ne venions pas assez souvent et dans l’attente de notre prochaine visite, les buis grossissaient sur le balcon de l’appartement de Varsovie comme une authentique manifestation de nostalgie. Il devenait urgent de rendre visite aux parents pour ramener les précieux pieds à Różynka.

 

Aujourd’hui, malheureusement, les buis sont envahis par la Pyrale du buis. Ce sont des papillons de nuit avec des couleurs noires et grisâtres. Au printemps, les chenilles ont dévoré l’écorce et les feuilles. Nous n’avons pas cherché à les traiter. A la fin du printemps, les arbustes étaient complètement desséchés et il ne nous restait plus qu’à les arracher. Mais la procrastination aidant, personne ne s’en occupa. A la belle saison, des hochequeues vinrent séjourner dans notre jardin. Comme par hasard, ce sont des oiseaux au plumage gris, blanc et noir. Ils ne sont pas très sauvages et nous observent parfois dans le blanc des yeux. En ce moment, il y en a un qui se balade devant la fenêtre de la cuisine, en hochant la queue avec impertinence. J’avais bien remarqué le matin, toutes les ailes noires et grises des papillons, arrachées et répandues sur la terrasse. Au début, je n’ai pas fait le rapprochement. Or, voici que notre hochequeue marche sur la cime du buis. Un papillon s’échappe. L’oiseau se jette dessus, l’attrape et le dévore en dédaignant les ailes.

Depuis quelques jours, certains pieds de buis ont repris du poil de la bête avec leur belle couleur verte. Jusqu’à la prochaine génération de chenilles !

Journal - Samedi 5 juillet 2025

 J’ai un voisin français. (Parce que oui, en Warmie, à moins de vingt kilomètres, on peut déjà parler de voisinage). Bref, cet hiver, avec Gaspard, nous étions allés en voiture jusqu’à Nowy-Kawkowo. C’est un tout petit village avec quelques maisons, une vieille église du quinzième siècle et un café-musée au centre. En face du café-musée, un chemin monte dans la campagne au milieu les champs. Gaspard voulait voir les champs de lavande. Une ancienne Varsovienne la cultive et fabrique différents produits cosmétiques. Mais en hiver, le weekend, le café est fermé, la boutique de la marchande de lavande est probablement fermée elle aussi. Nous faisons une partie de ce chemin à pied, puis comme il fait froid à pierre fendre, nous sommes revenons à la voiture en courant. Bien contents de nous réchauffer dans la chaleur de l’automobile.

Je n’y suis retourné accompagné par Aga qu’à fin juin. Il s’avère qu’en montant ce chemin sur un kilomètre, on arrive au pied d’une colline. Sur un vieux panneau, l’inscription « Chill Hill » peinte en jaune clair. La barrière est ouverte. L’herbe a été fauchée. En haut de la colline se dressent plusieurs bâtiments, une maison avec un jardin d’hiver, un atelier et une grange gigantesque. Dans l’atelier, Madame Leticia est en train de donner un cours de poterie à un groupe d’amatrices. Elle nous guide vers son compagnon, François, qui sert justement des cafés et des crêpes dans une petite remorque de marché. Dehors, des tables et des chaises de fortune sont installées entre les arbres, et c’est un véritable berceau de verdure où viennent rêver les nuages et le chant des oiseaux. Les crêpes aux poires et aux caramels sont tout simplement divines. Vont et viennent de jeunes clients allemands qui séjourne dans la maison d’hôte. En arrivant, j’étais loin d’imaginer autant d’animation dans ce trou de verdure. Je connaissais déjà François parce qu’il avait tenté d’ouvrir un café à Olsztyn, mais avait dû fermer boutique après quelques mois. Le café était mal situé je crois. Ici, pas de rues passantes, et pourtant… Quand nous avons fini notre café, le patron nous emmène dans la galerie de poteries du jardin d’hiver. Ce sont surtout des bols et des tasses dont la facture est très Wabi-sabi, ce qui forcément nous plaît énormément. Et nous repartons avec plein de nouvelles tasses à café sous le bras et l’envie de faire découvrir cet endroit à nos amis.

Journal - Mercredi 2 juillet 2025

 La Pavlova tiendrait son nom à celui d’une célèbre étoile du Ballet impérial russe, Anna Pavlova, qui séjourna dans un hôtel de Wellington en 1926. Le chef de l’hôtel aurait donc ainsi baptisé sa création en l’honneur de l’illustre cliente. Ce dessert à base de meringue nappée de Chantilly et de fruits rouges est très pratique quand vous ne savez pas quoi faire de vos blancs d’œuf, et je viens justement de faire des crèmes brûlées (parce que dans les crèmes brûlées, on n’utilise que les jaunes). Et comme Gaspard et Julia sont allés ramasser des cassis et autres fruits des bois et qu’on a acheté des fraises, Aga se met donc dans la confection de ce gâteau aux airs de nuage. Ce qui nous fait deux desserts (la crème brûlée sera pour le petit-déjeuner).

La meringue colle un peu aux dents, c’est très sucré mais irrésistible. Gaspard a aussi ramené des amélanches, parce que les amélanchiers poussent chez nous comme du chiendent. Il faut se dépêcher de les ramasser. Les oiseaux en adorent le goût aigrelet. Lorsque les amélanchiers ont atteint plusieurs mètres, il est alors impossible d’en ramasser les fruits.